En Pirogue Avec Humboldt
une exploration sonore de la forêt amazonienne
"En pirogue avec Humboldt"
Lecture musicale retraçant l'épique voyage d'Alexandre Von Humboldt en 1800 à la découverte de la forêt amazonienne
C'était une de ces nuits calmes et sereines qui sont si communes sous la zone torride. Les étoiles brillaient d'une lumière douce et planétaire. L'horizon semblait éclairé par les grandes nébuleuses de l'hémisphère austral. La vanille odorante décorait la lisière de la forêt ; sur le sommet de la colline, les flèches des palmiers se balançaient en frémissant.
Références
Lieu | Commune | Dept |
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Médiathèque | Trévoux | 69 |
Médiathèque | Dardilly | 69 |
Médiathèque | Genas | 69 |
Médiathèque | Pierre Bénite | 69 |
Médiathèque | Oullins | 69 |
Médiathèque | Villefranche Sur Saône | 69 |
Médiathèque | Lorette | 42 |
Médiathèque | Sainte Foy Lès Lyon | 69 |
Le Bivouac
La nuit était calme et sereine ; il faisait un beau clair de lune. Les crocodiles étaient étendus sur la plage. Ils se plaçaient de manière à pouvoir regarder le feu. Nous avons cru observer que son éclat les attire, comme il attire les poissons, les écrevisses et d'autres habitants de l'eau. Les Indiens nous montraient dans le sable les traces de trois tigres, dont deux très jeunes, C'était sans doute une femelle qui avait conduit ses petits pour les faire boire à la rivière. Ne trouvant aucun arbre sur la plage, nous plantâmes les rames en terre pour y attacher nos hamacs.
Tout se passa assez tranquillement jusqu'à onze heures de la nuit. Alors il s'éleva dans la forêt voisine un bruit si épouvantable qu'il était presque impossible de fermer l'oeil. Parmi tant de voix d'animaux sauvages qui criaient à la fois nos Indiens ne reconnaissaient que ceux qui se faisaient entendre, isolément. C'étaient les petits sons flûtés des sapajous, les gémissements des alouates, les cris du tigre, du couguar, ou lion américain sans crinière, du pécari, du paresseux, du hocco, du parraqua, et de quelques autres animaux gallinacés. Quand les jaguars approchèrent de la lisière de la forêt, notre chien, qui n'avait cessé d'aboyer jusque-là, se mit à hurler et à chercher de l'abri sous nos hamacs. Quelquefois, après un long silence, le cri des tigres venait du haut des arbres ; et, dans ce cas, il était suivi du sifflement aigu et prolongé : des singes, qui semblaient fuir le danger dont ils étaient menacés.
Je peins trait pour trait ces scènes nocturnes, parce que, embarqués récemment sur le rio Apure, nous n'y étions point encore accoutumés. Elles se sont répétées pour nous, pendant des mois entiers, partout où la forêt se rapproche du lit des rivières.
"Que le Ciel leur accorde une nuit tranquille et du repos comme à nous autres" disait le moine qui nous accompagnait au rio Negro, lorsque, excédé de fatigues, il aidait à établir notre bivouac.
L'oeil embrasse une surface écumante qui a près de deux lieues d'étendue. Du milieu des flots s'élèvent des rochers noirs comme le fer et semblables à des tours en ruine. Chaque île, chaque pierre est ornée d'arbres qui poussent des rameaux vigoureux ; ornées de mélastomes et de drosères, de fougères et de petites mimoses au feuillage argenté, ces îles forment des lits de fleurs au milieu des rochers nus et désolés. Un nuage épais flotte constamment au-dessus du miroir des eaux, et, à travers cette vapeur d'écumes, s'élancent les hautes cimes des palmiers Mauritia. Lorsque, le soir, les rayons ardents du soleil viennent à se briser dans le nuage humide, ces effets de lumières produisent un spectacle magique. Des arcs colorés s'évanouissent et reparaissent tour à tour ; leurs images vaporeuses flottent au gré des airs.